La situation sanitaire a mis au grand jour la pénurie de personnel en établissements d’hébergement, pénurie sur laquelle les acteurs du grand âge alertaient pourtant depuis plusieurs années. De multiples initiatives se mettent en place pour y remédier. Celles-ci sont souvent portées par les régions, Pôle Emploi, les OPCO ou encore certaines métropoles et Groupes mutualistes, avec l’ambition d’orienter vers la santé et le médicosocial des personnes jusque-là éloignées de l’emploi ou en reconversion. Interfaces entre les financeurs, employeurs et apprenants, les entreprises de formation se doivent de relever le défi de former « vite et bien ». Pour y parvenir, l’IFSO a fait le choix de parcours de professionnalisation adaptés aux fonctions spécifiques des EHPAD.
Les établissements d’hébergement face à des difficultés de recrutement
Une étude menée par la DREES révélait déjà, en 2018, qu’un établissement sur deux rencontrait des difficultés à recruter son personnel soignant. Le turnover était alors de 52.5% pour les infirmiers et de 48 % pour les aides-soignants, et les EHPAD privés s’avéraient être les plus concernés par cette situation. Le manque de personnel en EHPAD étant l’un des facteurs qui impacte le plus la qualité du service, comment les établissements font-ils face à cette situation ? Pour faire venir des personnels de l’extérieur, certains font appel à des étudiants ou mutualisent des postes avec d’autres structures. Le recours à l’intérim est aussi très fréquent, voire le débauchage d’employés d’autres secteurs. En interne, quand les heures supplémentaires et la réorganisation interne ne suffisent plus, on assiste aussi à des glissements de tâches (pouvant aller jusqu’au fameux « faisant fonction » pour des postes d’aides-soignants et d’AES). Et pour certains métiers ne requérant pas de diplôme (c’est le cas par exemple des fonctions d’Agent de Service Hospitalier et d’animateur), la question du manque de qualification peut se poser rapidement lors du recrutement.
Un turn-over lié à de multiples facteurs
Le turn-over en EHPAD serait, selon une analyse de logement-senior.com (article du 23/08/2019) la conséquence de différentes causes :
- une rémunération peu attractive,
- des plages horaires et plannings tendus,
- la charge de travail,
- un environnement de travail instable,
- le décalage entre le vécu terrain et les représentations sur les métiers en EHPAD souvent mal connus,
- une formation insuffisante par rapport aux situations de travail rencontrées,
- de faibles évolutions de carrière,
- des difficultés à travailler ensemble entre les différents métiers présents en EHPAD
Si les établissements n’ont pas attendu pour résorber la plupart de ces causes, la formation continue s’affirme comme un atout complémentaire pour répondre à au moins 4 de ces facteurs : éviter les fausses représentations sur les métiers avant l’entrée en emploi, former les nouveaux-venus et actualiser les connaissances sur l’accompagnement du grand âge, faciliter l’évolution de carrière par la qualification, et permettre aux différents métiers de travailler ensemble (on peut dénombrer jusqu’à 20 métiers différents dans un établissement !). L’Institut Formation Santé de l’Ouest prend en compte ces points dans la constitution de son offre de formation.
Permettre aux postulants de mieux appréhender la réalité du travail en EHPAD
Le développement actuel des Préparations Opérationnelles Collectives à l’Entrée en formation d’Aide-soignant ne doit rien au hasard. Il est né de la nécessité de limiter les abandons en cours de formation et les départs une fois en poste. Conçue de manière à remettre à niveau les demandeurs d’emploi souhaitant préparer leur entrée en formation d’aide-soignant, avec une part d’immersion en entreprise et de cours théorique et pratiques, la POEC permet d’éprouver sa motivation avec la réalité de la fonction et de découvrir que, malgré les facteurs de turn-over cités plus haut, les métiers des secteurs sanitaire et médico-social sont très valorisés socialement et gratifiants de par la richesse des contacts humains quotidien et de leurs modes de fonctionnement en équipes pluridisciplinaires.
L’IFSO vient d’initier avec OPCO Santé et Pôle Emploi des POEC sur les sites de Rennes, de Nantes et d’Angers en amont de la sélection à l’entrée en formation Aide-soignant.e. Face au succès de ce format, de nouvelles expérimentations vont démarrer en 2021 dans d’autres départements du grand Ouest.
Au-delà du diplôme, offrir la possibilité aux employés de faire face à l’évolution des situations de travail
Être titulaire d’un diplôme ne fait pas tout. Pour s’adapter aux situations rencontrées sur le terrain, le développement de compétences nouvelles par la formation en situation est très efficace. Pour exemple, le succès jamais démenti de la fonction d’Assistant de Soins en Gérontologie, un dispositif de 140 heures de formation à destination des aides-soignants, des auxiliaires de vie sociale et des Aides médico Psychologiques qualifiés accompagnant des personnes touchées par la maladie d’Alzheimer.
La formation d’infirmière coordinatrice dans le secteur médicosocial répond d’une même logique : apporter des qualifications spécifiques en sus du diplôme d’origine afin de mieux « coller » à la réalité du terrain.
EHPAD : une terre vraiment inconnue ?
Un article de la Nouvelle République d’Indre-et-Loire paru le 17 décembre dernier souligne en quoi intervenir occasionnellement en EHPAD pour des professionnels de santé revient à effectuer une mission « en terre inconnue »! C’est un fait rappelé par l’INRS dans sa présentation sur la prévention en EHPAD : le travail en EHPAD requière une approche spécifique, car « l’état de santé des résidents y nécessite des soins accrus, avec une prise en charge adaptée à des troubles cognitifs majeurs. Ces facteurs ont un impact sur la qualité relationnelle de la prise en charge et exposent les professionnels de ces structures à une charge physique et psychologique importante« .
Si l’adaptation est difficile pour une personne diplômée, qu’en est-il lorsque la personne recrutée n’a pas de diplôme ou de formation d’origine en lien avec l’activité demandée ? Celle-ci se trouve le plus souvent démunie face au public accompagné, et quand bien même certains gestes techniques peuvent s’acquérir sur le tas, la posture, la communication et la connaissance des troubles liés au grand âge ne peuvent pas faire l’impasse d’une formation adaptée, sous risque de se désengager de l’emploi.
Des journées spécifiques de formation pour mieux comprendre le vieillissement, et des dispositifs de courte durée tels que le parcours de professionnalisation des agents de service en 35 heures ont été élaborés afin de contribuer à la stabilisation professionnelle des agents et salariés.
L’évolution de carrière doit être envisageable via des diplômes et certifications
Autre facteur du turn-over : la faible possibilité d’évolution de carrière. En France, la prédominance du diplôme sur l’expérience dans l’évolution d’une carrière n’est plus à démontrer. C’est pourquoi l’IFSO propose différents titres et diplômes.
Des VAE collectives conduites en établissement permettent à des « faisant fonction » de prétendre au Diplôme d’Etat d’Aide-Soignant. Cet accompagnement structuré sur six mois est jalonné d’ateliers collectifs présentiels et à distance et d’entretiens individuels, de manière à créer une émulation collective vers la reconnaissance de son activité par le diplôme d’État. Succès garanti autant sur le plan personnel que pour la valorisation du métier dans l’établissement.
Le Certificat Professionnel d’Agent d’accompagnement en EHPAD permet quant à lui à des personnes en activité d’obtenir une certification en moins de onze jours de formation répartis sur cinq mois (ici reconnue par la Fédération de la Formation Professionnelle) tout en faisant l’apprentissage d’une posture professionnelle adaptée au public accompagné.
D’autres diplômes et titres, tels que le Diplôme d’Université de management de proximité et le Diplôme d’Université de management au sein des services techniques, administratifs et logistiques concourent aussi à valoriser les fonctions et sécuriser l’emploi.
Mais si les établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes rencontrent des difficultés pour recruter, d’autres secteurs sont également face à un manque de personnel qualifié, notamment le domaine de l’accompagnement à domicile. L’IFSO en est conscient et a déjà prévu parmi ses « chantiers 2021 », de développer un parcours de formation spécifique pour les agents d’accompagnement à domicile. Et là aussi, que ce soit pour s’adapter aux différentes situations de travail, pour ouvrir ses possibilités d’évolution de carrière et pour valoriser les salariés, notre objectif est de faire en sorte que ces parcours soient reconnus…